Laine, Petites histoires de coccinelles

Il était une fois… la laine et moi

Ygaëlle aime la laine depuis toujours et se jette dans un ballot de laine

La laine et moi…
Cheminement, hommage et autocongratulation


(Attention, ça va être long 😊 😊 )

J’ai rencontré la laine à 11 ans, grâce à Suzy, que je ne remercierai jamais assez. Ce fut le début d’une histoire riche, longue, et pas terminée.
C’était la maman d’une copine d’école, et elle filait. Elle filait la laine. Et j’ai trouvé ça tellement magique ! Une toison, presqu’encore chaude de sa brebis, tout juste lavée, devenait fil puis chaussettes ou pull.


Depuis, j’adore cette transformation, d’abord de l’observer, puis dans mes mains. Le rythme à garder, les pieds qui pédalent, la tension, la précision des doigts, les fibres qui vont et viennent ou se cabrent et cassent, le fil qui s’enroule.
Je pourrais filer des journées entières. En lien avec tant de femmes du monde et de l’histoire de l’humanité.

Un peu après, je me suis mise aux chaudrons de teinture, avec Danièle, Monique et d’autres. D’immenses casseroles humaient la pelure d’oignons ou le brou de noix lors d’après-midi artisanales et festives très nature. Et une bonne partie de mon argent de poche d’ado est venue de la vente de mes écheveaux de fils à tricoter filés à la main, sur les marchés artisanaux de l’époque, déjà.

Y’a eu l’invasion de mites dans la maison de mes parents, déjà.
Et l’achat d’un premier rouet, le cadre à tisser fabriqué par papa (celui qui est maintenant dans l’atelier) et les déménagements, toujours avec le rouet dans le salon, même immobile des années durant.

Plus tard, bien plus tard, j’ai retrouvé l’odeur et le toucher de la laine. Les touchers, plutôt, tant la laine est variée.
Et j’ai découvert sa solidité, ses origines, sa douceur (pas toujours), son utilité, le travail qui est derrière, ses enjeux, ses qualités de régulation de l’humidité, de résistance au feu, d’isolation thermique et acoustique, ses couleurs, ses textures, la créativité qu’elle permet.
J’ai alors voulu prendre le parti de la laine wallonne.

D’abord quelques heures par semaine, me formant sur le tas, découvrant l’incroyable : nos laines massivement exportées en Chine à des prix ridicules loin de couvrir le dur travail des éleveurs ovins.
Et puis plus largement, avec un comité de pilotage qui deviendra le conseil d’administration de l’association Filière laines, le meilleur CA du monde !
On en a fait, du travail, pour la laine, les éleveurs, les tondeurs, les artisans, les entreprises du secteur.
On a imaginé, on a discuté, on a bossé, on a créé tant de choses, avec Patrice Rampanelli de la La Bergerie du Gros Cron, Charlotte Marembert de Myrobolan, Manoëlle Vanschepdael, Marianne Raes, Karine Thollier, Emelyne Vostier de VE Création, Florence, Sébastien, Cécile Schalenbourg, Véronique Corman de A pas feutrés, Fabienne Schmit, Sylvie Bertaux, Nadine Bosmans, Hervé-Jacques Poskin du Cluster écoconstruction, Hélène Ghyselinckx de Natagora, Joëlle, Caroline Lemahieu de la Chouette laine, et j’en oublie.
Et des collègues, bon sang, la chance que j’ai eue d’avoir travaillé avec Sophie Deger, Nancy Goethals, Isabelle Wéry, Juliette Pagacz, Philippe Schreurs, Romane Pirotte et Florence Béra ! Vous n’imaginez même pas, un truc de ouf !
J’ai tant appris, avec eux.

Appris la laine, ses transformations, l’élevage, ses réseaux, les entreprises, ses contraintes et potentiels, les sites internet, les négociations (…) et j’en passe.
Avec eux, j’ai initié, irrigué et coordonné un très gros projet de coopération transnationale sur la Wallonie, la Lorraine, le Luxembourg (DEFI-Laine) avec des parcs naturels, des écoles, des associations liées à la protection de la nature, à l’écoconstruction, à la recherche, au développement économique local ou au tourisme, des groupements d’éleveurs (…). Quelles richesses, quelles rencontres, quels projets d’ampleur la laine nous aura permis !

En parallèle, j’étais devenue une des précurseuse de la transformation de laines locales en Wallonie, en créant ma marque, La Laine des coccinelles.
Je voulais montrer que c’était possible ! Possible de transformer des quantités suffisantes de laine pour faire des produits de qualité, en (petite) série, à des prix abordables, avec ‘’nos’’ laines payées équitablement aux éleveurs.

La première année, je n’avais que du fil à tricoter, et je me suis remise aux chaudrons de teinture.
Et puis, d’année en année, j’ai réinvesti tous mes bénéfices dans de nouveaux produits : gants et mitaines, bonnets, chaussettes, sacs, tissus, feutres, maniques, carpettes de bain, sacs isothermes, sacs à tambour, … Et j’ai même racheté et fait remettre en route une très grosse et ancienne cardeuse de 1896 qui fait 4m*2m ! Je l’ai appellée la Grosse Bertha, je vous en reparlerai.

Toujours cette même magie qui opère, de la toison au fil ou au feutre, de la fibre à l’objet utile et chaleureux.
Ce n’est pas simple, de trouver les entreprises ad hoc, d’apprendre à parler leur langage, de trouver des partenaires, de calculer des prix justes, de prendre les bonnes décisions et de vendre. Ah oui, (se) vendre, c’est sans doute ça le plus difficile.
Mais manifestement c’est possible.

Que de rencontres, pour en arriver là, à qui je voudrais rendre hommage.
Hommage aux brebis, patientes, qui transforment l’herbe en lait ou viande et en incroyable laine.
Hommage aux éleveurs et éleveuses qui les soignent, se débattent dans les aléas de l’agriculture contemporaine et s’inquiètent pour elles. Je pense en particulier à Patrice Rampanelli, Joseph Remillon et ses fils, Charles Robert et Eliane Merias, à qui j’achète la laine. D’âges, de formations, de styles différents, ils sont passionnés par leur difficile métier, qu’ils tentent de renouveler pour s’adapter aux enjeux de notre temps. Mais aussi à Eric de la Bergerie De la Scayes, Marc Remy, Cécile Scalenbourg, Justine Mouget, Barbara Vissenaekens et Peter De Cock, Le P’tit Mouton Vert, pour n’en citer que quelques uns.
Hommage aux tondeurs qui récoltent la laine avec soin (et suint).


Hommage à la laine et à ses multiples qualités qui me permettent de relier sensualité, créativité et politique, de faire travailler mes mains, mon cœur et ma tête.
Hommage à toutes les entreprises avec lesquelles j’ai travaillé ou travaille : Traitex, Terrade, Ceetex, Les poils d’Assenay, Marquet sprl, les entreprises de feutrage, de tricotage, de tissage, de couture, qui se battent pour garder de l’activité et des compétences textiles ‘ici’.

Hommage à ceux et celles qui cherchent, transmettent, partagent, soutiennent, comme feu la Filière laines, les Filandières de Wallonie, Go Transition, ou par exemple Réseau Lainamac et Felletin Patrimoine Environnement, en France. Ou comme l’European Wool Association que nous avons récemment fondée, avec mes complices Nathalie Ketterle et Simon Gill, et 20 autres personnes de 18 pays européens.
Hommage très très appuyé à tous ceux et celles (surtout celles, en fait) qui trient, évaluent, touchent, transforment, reniflent, hésitent, choisissent, investissent, se forment, s’impliquent, créent, y croient, dessinent, vendent, évitent de renoncer, et osent montrer que la laine a un avenir et qu’il commence chaque jour.

La liste est de plus en plus longue, c’est super !
Et je pense en particulier à Ophélie Benito de Mollis, Laurence Anglade de La Brebis Perrette, Mandalaine, Filature Colbert, Françoise Dupéty, Melanie Hoff, Anne Alaime de L’Alliance berbère, Stéphane Ermann de Mos-Laine, Florence Momin, Nadine Singeot, Jean Philippe Rouanne, Wi Bk Aumann, Marc Decker, Nathalie Ketterle de Kollektion der Vielfalt, Sophie Bertolotti de Kamalaine, Charlotte Marembert de Myrobolan, Isabelle Norboge-Bindreiff de Fleurs de laine, Thierry Terrade, Jean-Michel Brissay-Châtre, Terre De Laine, Larissa Ivannikova, Laurent Laine, Sandra Martinez de Cocotte de mailles, Christelle Nihoul de ChistalLK, Günter Wilhelm de Tumulus fiber mill, Chantal Florentin, Marie Algranate, Lauriane Detiège, Laetitia Body, Léo Eléonore Moine, Caroline Chateaux de Laine de coeur, Caroline Lemahieu de La Chouette laine, Cécile Riffet de Plume de mouton, Laines Paysannes, Dominique Blandiaux de Lanado, By Night, Filature de Niaux, Véronique Corman de A pas feutrés, etc.
Allez voir leur travail, elles et ils font un boulot formidable !

Hommage à vous tous qui posez des questions, soutenez, achetez. Et à ceux qui m’encouragent au quotidien, comme par exemple Bernard Mottet, Nayira Painblanc-Dupriez ou Marie-Anne Dethier.
Aujourd’hui, c’est la journée d’autocongratulation ;-).
Je suis heureuse et fière d’avoir de vraies connaissances autour de la laine et de ses transformations, de continuer à les enrichir tous les jours et de les partager, par exemple lors de formations.
D’accompagner la création ou le développement de projets individuels ou collectifs de valorisation de la laine, en France, en Belgique et au Luxembourg.
De fêter cette année les 10 ans de La Laine des coccinelles avec plusieurs nouveaux projets !

Et si vous êtes arrivé jusqu’ici, merci. Ça m’a fait du bien 😊 🙂 🙂
Vous trouverez plein de choses passionnantes sur ce site, entre autres sur la laine. Et pour ceux qui voudraient un accompagnement de leur activité ou une formation spécifique, je vous donne rendez vous sur mon site de service  www.ygaelle.com .

Et vivre la laine ❤ !

Filage de la laine à la main au rouet, début de la filière laine

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